Voyage à Stockholm


Image Depuis 1901, selon les dernières volontés du chimiste Alfred Nobel, la fondation Nobel décerne chaque année le célébrissime prix éponyme à ceux « ayant apporté le plus grand bénéfice à l'humanité ». Soit !
La physique, la chimie, la médecine, l’économie, la littérature et aussi la paix entrent dans ce qui peut se quantifier par ce critère. Les mathématiques ont leur médaille Fields qui peut s’apparenter et donc s’associe à cette grande fiesta des grands bienfaiteurs mondiaux. Pour le reste, rien ; L’art (à l’exclusion de la littérature) ne fait aucun bien à l’humanité… pas plus que l’écologie.

Depuis 1901, six disciplines (au sens large : la médecine comprend la biologie) voient leurs meilleurs – au maximum 3 par discipline – représentants récompensés pour leurs récentes découvertes ou améliorations. Leurs noms deviennent célèbres pour la postérité. Leurs portefeuilles deviennent garnis pour la poursuite de leurs recherches. L’humanité toute entière se félicite d’avoir en son sein de tels hommes ou femmes contribuant, pour chacun (et en particulier pour moi… je sais… je sais…), à compenser la flagrante médiocrité de son propre giron et, pour l’ensemble, à avancer dans le sens du progrès. Chaque année, depuis 1901, les lauréats de ces six disciplines sont les ambassadeurs du génie humain pour le reste de l’univers.

Selon David Landès*, l’horloge et les bracelets-montres sont des inventions aussi révolutionnaires que la roue ou la maîtrise de l’électricité. Tout laisse croire qu’il n’est pas le seul à penser cela : la maîtrise du comptage du temps a permis la synchronisation, la revendication du temps de travail, la navigation, la cartographie, les rendez-vous, les transports en commun, la compétition… songez donc à tout ce qui est lié à une heure dite, ou un temps compté ! Et pourtant… 
Depuis 1901, tous les ans, le 10 décembre à 10 heures GMT+1 précises, commence la cérémonie de remise des prix Nobel sans qu’aucune mention ne soit faite à cette invention qui a pourtant chamboulé le monde plus encore que la découverte de la radioactivité : l’horlogerie.
Et alors ? N’a-t-on rien élaboré de nouveau dans ce domaine depuis lors ? John Harrison, Ferdinand Berthoud, Thomas Earnshaw, John Arnold, Antide Janvier, Hubert Sarton, Abraham-Louis Breguet, etc., auraient-ils tout inventé qu’aucun garde-temps ne soit à ce jour plus admirable ? 
Ne pouvait-on imaginer une telle récompense que le prix Nobel d’horlogerie pour René-Alfred Chauvot, pour Jean-Louis Reutter ou pour Charles Vermot ? Et George Daniels, n’est-il pas à lui seul toute l’horlogerie mécanique moderne ?
Image
Depuis 1974, le prix Nobel ne peut être décerné à titre posthume. Il n’en fallait pas moins pour qu’aujourd’hui, un groupement de spécialistes forme une relative contestation à cette injustice flagrante et qu’enfin on obtînt un comité de désignation de candidats à ce qui sera désormais le prix Nobel d’horlogerie. La chose est enfin créée.
Ce comité est composé de 5 experts élus pour 3 ans mais pouvant être réélus. Il ne peut s’agir d’horlogers productifs trop contraints par leur expérience, ni de journaliste trop étouffé par son ego ou de célèbre vendeur trop licencieux et cupide. Ces ambassadeurs sont de vrais passionnés, des érudits, des sensibles. Chacun a son point de vue, mais tous se complètent, surtout le dernier.
Pour 2012, les fora ont fait moisson : sont élus FoverstaOrigamiSteyrEd the Grocer et DidierL
Dès le 10 Décembre 2012, et chaque année pour toutes les années à venir, de un à trois lauréats assisteront à la cérémonie et déjeuneront au banquet de cette grande journée car ils auront, par l’horlogerie, apporté le plus grand bénéfice à l'humanité. 
Peut-on déjà imaginer qui va voir sa trésorerie augmentée de 8 millions de couronnes (amusant) ? Sera-ce Vincent Calabrese pour son mouvement baguette ? Anthony Randall pour son spiral en verre ? Vianney Halter pour le Steampunk et la qualité du travail ? Denis Flageollet pour la résonique ? Ludwig Oechslin pour son quantième annuel ultra-simple ? Jean-Baptiste Viot pour sa réintégration de l’horlogerie du XVIIIè ? Yves Corthesy pour le « cardan d’échappement » ? Guillaume Tetu pour son mouvement tournant ou pour sa chaîne des heures ? …

Les paris sont ouverts. Mais en décembre 2012, on entendra enfin :
« Le prix Nobel d’horlogerie est attribué à… »
Image

*L'heure qu'il est. Les horloges, la mesure du temps et la formation du monde moderne

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire