Pourquoi mécanique ? ...faut pas juger !


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Pfffiiioouuuuuuuuuuu… Pas facile de trouver chaussette à son nez !
Tout a commencé pour moi - Jacques, 47 ans, vétérinaire d’intérieur et placomusophile à retordre - lorsque j’ai eu 40 ans… Un de ces fichus amis d’enfance a proposé à d’autres de mes fichus amis d’enfance de se joindre à lui pour m’offrir un cadeau inoubliable, le genre d’objet qui marque aussi bien l’amitié qu’une étape importante de la vie, le cadeau à la fois unique et symbolique qui caractérise les vraies valeurs réelles de la vraie vie : une montre.
Une montre oui… mais une montre mécanique !! Les loulous n’en étaient pas à une bonne blague près et m’ont tout simplement dit : « toi qu’est difficile et qui nous fait toujours ch..r avec tes achats "réfléchis" : plutôt que l’objet lui-même, on t’offre une intention d’achat de montre, cause qu’on te laisse choisir le modèle et qu’on ira la chercher pour toi… Alors, c’est quoi qu’tu veux, comme montre jolie ? », qu’ils y ont dit, les poteaux.
Mais moi j’en savais rien…
C’est sûr, c’était sympa comme idée. Ca m’plaisait même beaucoup, mais… quel modèle ?!
Comme tout le monde, je suis allé à la renseigne sur les sites et les fora qui causent des montres pour tenter de me faire une idée. Puis mon idée de la montre a évolué. Puis j’ai lu le bouquin de l’autre tordu là, le David Landes, sur l’importance de l’horlogerie dans l’évolution des civilisations. Puis j’ai lu des ouvrages techniques, du manuel des castors juniors aux études de Hans Jendritski en passant par le pavé de George Daniels ou le roman à suspens de François Lecoultre. Puis j’ai fouillé les revues et me suis promené dans toutes les boutiques qui vendaient ces montres dites "de prestige". Puis j’avais toujours pas vraiment d’idée, en fait…
Parce qu’il faut se dire : une montre, ok ! …mais une montre, pour quoi faire exactement ?
Les comiques, y vont m’acheter une montre ; mais si c’est juste pour avoir l’heure, j’vais pas leur dire de m’acheter une Timex à 3 sous ou de m’abonner à "Tuning et nudisme" juste pour avoir la montre-boussole qui s’accroche n’importe où. Si c’est pour avoir un beau bijou, ils m’auraient proposé une gourmette gravée "le couillu", du p’tit nom qu’ils m’ont toqué. Donc j’achète quoi, moi ?
Me suis-je ainsi retrouvé devant ma question paramétapsychophysique comme un caméléon sur une jupe écossaise : pourquoi exactement que j’voudrais-je une montre mécanique aujourd’hui ? (…et comment Oriane va-t-elle hydrater sa peau ?) C’est quoi qui fait que c’est bien, une montre mécanique ?
Alors ouai…
Tout de suite, je pense au père bélître et sa bourde, celui qui aurait plutôt dû dire « si à 50 ans t’as pas du tipex, t’écris pas des c..nneries ! » : une montre mécanique, c’est chic, c’est classe, c’est cher, c’est LE bibelot de la crise de la quarantaine… c’est comme acheter des pompes, mais les modèles en cuir de pingouin du Bélize qui coûtent le quadruple des meilleures Finsbury juste parce qu’il n’y a pas de pingouin au Bélize. Bon. Ok ! J’aime assez jouer à ça, mais en trichant alors ; généralement, j’achète un truc pas trop cher et je colle négligemment une étiquette de prix beaucoup plus élevé pour qu’on le remarque et qu’on sache que je suis "grand train". Mais je vais pas claquer plusieurs milliers d’euros rien que pour jouer à ça, d’autant qu’il faut se lever tôt pour trouver quelqu’un dans une soirée qui fait la différence entre une F.P.Journe et une Guess (Pati) toute clinquante.
J’ai bien pensé que ça pouvait être pour faire partie du club fermé de ceux qui « savent », en gros, ce qu’est une montre de prestige et pouvoir s’inscrire sur les fora populeux en ajoutant des photos floues de sa Jaeger-LeCoultre sous tous les angles en précisant, comme si les lecteurs en doutaient, que c’est la mienne à moi et qu’il s’agit d’une réédition de la fameuse montre de plongée avec laquelle le professeur Zissou a bu la tasse en 1962 dans le triangle des Baléares. Mais il eût suffit de parler montres. Pas besoin d’en posséder.
Non…
Une montre mécanique, c’est le bijou que tu vas porter fièrement parce qu’il est à la fois beau, de grande qualité et qu’il est symbolique de tout ce que l’horlogerie représente. C'est-à-dire beaucoup. Certes, la montre mécanique, c’est fait pour être porté… (pas pour être dans un coffre : suivez mon regard).
J’ai toujours pensé que je voulais paraître mieux aux yeux des gens que je ne connais même pas, mais en fait, je suis à la recherche de ceux qui sauraient bien me percevoir en espérant qu’ils puissent m’aider à mieux me connaître ; la montre est un signe. On n’achète pas une montre mécanique pour soi, mais pour la montre elle-même. Comme le dit mon poteau Olivier : « pour la poésie… pour la dimension humaine d’un mécanisme à la fois génial (au sens fort) et à notre échelle… parce que mon Papa il avait pas de quartz et que le tic-tac, c’est ma nostalgie… » Parce que franchement, c’est le dernier domaine où le travail bien fait peut être valorisé comme il se doit et comme c’était le cas jusqu’aux années ’60 lorsque les Madmen ont déclenché la déchéance… Parce que la montre est tout simplement une des plus grandes inventions humaines et qu’il ne faudrait pas l’oublier à cause de l’électronique… Bref, pour toutes ces raisons autres que les balivernes racontées dans l’édito de l’express hors série de fin 2010…

Cela étant, ça ne me dit pas laquelle choisir parce que beaucoup de (top) modèles pourraient suivre ce cahier des charges. Certes, si j’estime que LA montre doit parfaitement répondre aux critères d’œuvre d’art et d’objet horloger regroupant toute l’histoire de l’horlogerie dans la qualité de son mécanisme, ses finitions et sa présentation, qu’elle doit bien répondre aux raisons pour lesquelles elle a essentiellement été conçue, qu’elle doit rester de dimension humaine et rappeler mon Papa en faisant tic-tac, alors il ne reste plus un choix délirant. En fait, il reste 2 noms de marque.
Mais on se contentera d’un bon compromis… Une Hautlence ou une De Bethune devraient faire l’affaire, non ?
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(Photo : Curtis D. Thomson pour ‘The PuristS‘)